Destruction
Orpheus (1865, Gustave Moreau) |
La Destruction
Sans cesse à mes côtés s’agite le Démon;
II nage autour de moi comme un air impalpable;
Je l’avale et le sens qui brûle mon poumon
Et l’emplit d’un désir éternel et coupable.
Parfois il prend, sachant mon grand amour de l’Art,
La forme de la plus séduisante des femmes,
Et, sous de spécieux prétextes de cafard,
Accoutume ma lèvre à des philtres infâmes.
II me conduit ainsi, loin du regard de Dieu,
Haletant et brisé de fatigue, au milieu
Des plaines de l’Ennui, profondes et désertes,
Et jette dans mes yeux pleins de confusion
Des vêtements souillés, des blessures ouvertes,
Et l’appareil sanglant de la Destruction!
— Charles Baudelaire
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Translation:
Restless, the Devil moves by my side,
Swirling about like an elusive air;
I swallow some and feel fire in my lungs,
Overcome with shameful, unquenchable lust.
Knowing my passion for Art, he assumes
The most seductive form of woman,
And under specious pretexts of deceit,
Accustoms my lips to the vilest of bitters.
Far from the eyes of God, he leads me
Deep into the wastelands of Despair,
Gasping and broken from exhaustion,
And flings before my bewildered eyes—
Soiled garments, festering wounds,
And bloodstained implements of Doom!
(Wiesbaden, 2018)
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